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6 mai 2006

Le mythe de Thésée (partie 4.)

Laodamos, le jeune esclave Thrace le savait mieux que personne : à l'Erechthéion, palais d'Athènes, le meilleur endroit pour connaître les dernières nouvelles de la cité, ainsi que les rumeurs qui la parcouraient se trouvait être les cuisines royales. Arétè, la cuisinière faisait venir des alentours les marchands ambulants les plus réputés de Grêce, mais également les plus bavards... Ils arrivaient tous au lever du soleil avec leurs charrettes traînées par des boeufs lourds, et tout en déposant leurs cargaisons, ils confiaient à l'esclave les derniers secrets sont ils avaient été les témoins... Laodamos n'était pas en reste! Il se précipitait chaque matin pour offrir son aide aux paysans, tout en tendant une oreille attentive...

Ce n'était pas que le jeune homme se sentait particulièrement éloigné du monde citadin, mais en tant que pédagogue, il devait se tenir au courant de l'actualité de la Cité...

Et tandis qu'il déchargeait les sacs de raisin lestés de figues, les tonnelets d'olives fraîches ainsi que les fagots de blé doré par le soleil, le jeune homme repensait au jour de sa venue au palais, alors qu'il venait tout juste d'être vendu par son ancien propriétaire. Il avait quinze ans, et était esclave depuis sa naissance...

Les couloirs du palais étaient immenses, des fresques monumentales ornaient les murs. Elles représentaient les origines d'Athènes, la déesse Athéna y offrait un rameau d'olivier au roi mythique fondateur de la cité, Kékrops, le roi-serpent.

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Cratère, 410 avt J.C. (Athèna offre l'olivier à Kékrops)

Mais tout ce qu'il avait vu, c'était cet homme aux cheveux d'argent et à la toge brodée de fils d'or. Si grand, si imposant... Laodamos aurait préféré disparaître sous terre plutôt que cet homme ne le regarde... Pourtant, ce fut ce qu'il fit. Egée, l'ancien roi d'Athènes, venait de lui confier à lui, petit esclave qui parlait grec d'un ton hésitant, une tâche de confiance : pédagogue (accompagnateur) de son petit-fils, Hippolyte, prince de la Cité d'Athènes.

Hippolyte, à cette époque n'était pas plus grand qu'un petit chien et il en avait d'ailleurs adopté le comportement... A quatre ans, le gamin échappait à toutes ses nourrices, se faufilait à travers les pièces du palais qu'il connaissait et se sauvait seul au milieu de la foule des pélerins qui montaient chaque jour sur l'Acropole. Quand ce n'était pas avec des chiens ou des chats errants, il se bagarrait avec des enfants pauvres et rentrait les joues en sang et les vêtements en lambeaux. Et alors que cette situation était embarrassante pour un enfant de citoyens, elle devenait plus qu'intolérable pour le fils du roi... Combien d'heures Laodamos avait-il passé à rechercher le prince? Combien de fois s'était-il rongé les sangs en s'apercevant de la nouvelle disparition d'Hippolyte? Et pourtant, deux ans plus tard, le jeune esclave avait conservé son poste de pédagogue...

Il était vrai que Thésée n'avait que peu de temps à accorder à son fils, tout son esprit étant tourné vers la constitution athénienne qu'il était en train de fonder. De même, Egée, bien que se sentant très concerné par l'éducation de son petit-fils, ne pouvait lui consacrer que quelques tours de clepsydre, pas plus. Hippolyte se retrouvait donc le plus souvent confronté à lui-même, perdu dans les couloirs trop grands de l'Erechthéion, n'ayant de vraies relations qu'avec les exclaves qui s'y afféraient... Mais ce qui dérangeait le plus le jeune pédagogue étaient les rumeurs qui parcouraient la Cité, à propos du prince. Les citoyens et les autres n'hésitaient pas à dire que l'enfant, né d'une mère barbare n'avait pas sa place au sein du palais. En effet, comment un barbare pourrait-il être un jour apte à gouverner une des cités grecques les plus prestigieuses? Laodamos préférait serrer les dents et ne rien dire : comment un esclave aurait-il pu élever la voix?

Après avoir écouté les derniers ragots, Laodamos se hâta vers la chambre du jeune enfant. Ce matin-là, Egée les avait convoqués tous deux dans la salle du trône, ce qui inquiétait le jeune exclave, étant donné qu'il n'en connaissait pas la raison...

Ils se rendirent dans l'immense salle le plus rapidement possible, tous deux intrigués par la mystérieuse convocation d'Egée... Au milieu de la pièce, entre de gigantesques collones, sur le trône chryséléphantin (d'or et d'ivoire) de la cité, Thésée était assis, son père Egée se tenant debout derrière lui.

- Hippolyte, tu viens d'avoir 6 ans, commença Egée (Laodamos baissa la tête et recula d'un pas, derrière l'enfant), Laodamos, ton pédagogue s'occupe bien de toi, mais nous avons discuté longuement à ton sujet avec ton père. Nous en sommes arrivés à la conclusion qu'il était temps pour toi de recevoir une éducation digne de ce nom. (Le jeune esclave sourcilla. L'éducation d'un enfant débutait à l'âge de sept ans, lorsqu'il quittait le gynécée... Mais Hippolyte n'avait pas été élevé par sa mère, ceci expliquait cela.) Ton père, Thésée, m'a laissé choisir la personne qui, à mes yeux, serait le meilleur pédotribe (enseignant)... Et la voici.

De l'autre côté de la pièce, les portes cyclopéennes s'ébranlèrent dans un fracas assourdissant. Laodamos n'osait pas lever la tête puisque personne ne lui avait demandé, mais ses oreilles étaient grandes ouvertes. Le bruit ne cessa pas, des pas lourds se rapprochèrent, comme si cette personne montait à cheval dans la salle du trône! L'esclave leva un oeil, mais ne put apercevoir que l'enfant. Hippolyte, les yeux écarquillés avait reculé, d'horreur et était en train de serrer la tunique de son pédagogue aussi fort qu'il le pouvait! Laodamos, sans en recevoir la permission leva la tête... Il faillit tomber à la renverse.

Devant lui, l'homme était gigantesque: des cheveux noirs comme les plumes d'un corbeau, une vilaine cicatrice avait épargné son oeil gauche dont la pupille était aussi rouge que le sang, mais divisait le sourcil qui l'encadrait en trois traits brousailleux. Son torse était nu, une autre cicatrice, en forme d'étoile, désignait pratiquement l'emplacement du coeur et ses bras musculeux étaient gigantesques, prêts à écraser la tête de celui qui le contredirait... Mais le pire était que cet homme n'avait pas de jambes!! A la place, le corps ferme d'un cheval de trait à la robe noire et brillante! Un centaure!!!

A suivre.

Basileus.

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Commentaires
T
Je cherche le récit le plus complet sur Thésée. Où puis-je le trouver ? Je m'intéresse particulièrement à l'épisode de la descente aux enfers (la chaise d'oubli). Ovide ne semble pas en parler, ni Plutarque. Pourvez-vous me donner une piste ?<br /> <br /> Merci,<br /> <br /> Pierre Audet<br /> Montréal
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