Molière / La Fontaine : le grand combat...
En attendant les résultats alletants des présidentielles, je vais en profiter pour vous parler de l'actualité cinématographique et littéraire. Je parle bien sûr des deux gros cartons Molière (avec Romain Duris, Fabrice Lucchini et Edouard Baer) et Jean La Fontaine, le défi (avec Lorànt Deutsch, Philippe Torreton et Jean-Claude Dreyfus.) Et puisque j'ai été les voir tous deux en tant que spectatrice, mais également en tant que professeur de français, je me propose de les comparer.
Un Romain Duris plein de charme...
Un Lorànt Deutsch plein de verve...
Molière, la biographie non-officielle.
Indéniablement, le film Molière est le gros film français du moment : un site officiel bétonné avec un espace pour la presse et un autre pour les enseignants, un dossier de presse très complet et alléchant, un livret pédagogique qui avait été offert aux enseignants, un casting de rêve et des critiques quasiment unanimes... Que demander de plus ?
Jean de la Fontaine, le défi : règne de l'irrévérence.
Alors que les autres artistes se précipitent au service du monarque de droit divin, un homme se lève pour affirmer son soutien au surintendant déchu, le poète Jean de La Fontaine. Colbert se jure alors de faire plier le rebelle, seul artiste du royaume à situer son art au-dessus du roi.
Dès lors, La Fontaine, même dans la misère, ne renoncera jamais à ses convictions. Sans argent, il résiste, s'amuse, observe, écrit les Fables, pamphlets assassins contre un régime despotique en pleine décadence.
La Fontaine / Colbert, un affrontement qui durera jusqu'à la mort.
Jean de La Fontaine, le défi s'annonce plus comme un out-sider, face au grand Molière. Les choix d'acteurs sont plus audacieux : Deutsch en La Fontaine, Julien Courbey en Molière, Jocelyn Quivrin en Louis XIV... Le pari semble donc plus risqué, les critiques sont d'ailleurs fort partagées. Le film est sorti mercredi 18 Avril, il est donc à ce jour assez difficile de se faire une idée concernant l'impact sur le public.
Deux génies littéraires remis au goût du jour...
Avant toute chose, je me pencherai sur la tendance du moment : Il faut raffraîchir les classiques. Fini les vieilles fables poussiéreuses, les vieilles pièces incompréhensibles, désormais on nous offre sur un plateau d'argent des auteurs Rock and Roll et rebelles. Car 'rebelle' est bien la tendance. Qui dit 'génie' dit 'hors de son temps', qui dit 'jeune' dit 'éprit de liberté.'
Le public aime les rebelles : Molière ne rêve que d'une chose : quitter l'ombre de son père et mettre un terme à l'existence de Jean-Baptiste Poquelin. Jean de La Fontaine se pose lui aussi en frondeur face au nouveau pouvoir absolu de Louis XIV. Ils sont jeunes, des rêves plein la tête et toute l'énergie de la jeunesse dans la paume de leur main...
Des acteurs de talent, des films alléchants.
Même ceux qui n'aimaient pas le français à l'école peuvent aller voir ces films rien que pour leur casting luxueux. Tout d'abord Molière réunit un Fabrice Lucchini époustouflant d'humanité dans son rôle de M. Jourdain, un Edouard Baer charmeur et coquin ainsi qu'une Ludivine Sagnier craquante et hautaine...
Les choix de Jean de La Fontaine se révèlent plus étonnants, pour ne pas dire hasardeux : Julien Courbey en Molière est à la limite du ridicule, n'ayant pas les épaules pour un tel rôle, Jocelyn Quivrin en Louis XIV est assez pâlot (disons que j'attendais autre chose du Roi Soleil...) Heureusement Torreton se révèle génial d'austérité dans son rôle de Colbert tandis que Lorànt Deutsch est tout simplement sublime (mais je ne suis pas objective, je l'adore ! ^^)
Incohérences et relativités.
Alors bon, me voilà sur la partie moins drôle... En effet, quand on fait un film à valeur historique ou biographique, il est tout naturel de s'attendre à quelques critiques... Alors que Molière est le film qui s'est attiré les critiques les plus dithyrambiques, c'est certainement à lui que je m'attaquerai le plus. Oeuvre totalement fictionnelle (qui se reconnait en tant que telle), Molière part du postulat que l'auteur n'a rien inventé, que son inspiration lui viendrait d'aventures qui lui seraient arrivées l'année où il a disparu de la circulation.
Et là, je fronce les sourcils, en m'écriant, éhontée, que Molière n'a effectivement rien inventé, mais qu'il a puisé non dans son expérience personnelle, mais dans le théâtre comique antique, ni plus, ni moins !
Heureusement Jean de la Fontaine mise sur les recherches documentées. En effet, en tant que protégé de l'intendant Fouquet, Jean de La Fontaine a bien été mis dans une position délicate vis-à-vis du roi. Par contre, la jeunesse de Deutsch, bien que très photogénique, est tout à fait inexacte, puisque le début de l'histoire prendrait place lors de la 41ème année de La Fontaine. Il n'empêche que le film précise bien que l'auteur puisait son inspiration dans les fables d'Esope ainsi que dans certaines fables indiennes, ce qui m'a rassurée, par rapport aux libertés prises dans Molière.
Conclusion...
En guise de conclusion après ce survol rapide, je dirai tout simplement que les deux films sont à voir, pour des raisons différentes... Molière pour son casting génialissime et pour ses citations savoureuses (néanmoins cela reste difficile à déchiffrer pour un jeune public ne maîtrisant pas les oeuvres de Molière...) Jean de la Fontaine pour Lorànt Deutsch (je vous ai dit que je n'étais pas objective ! >.<) et pour sa photographie somptueuse (Molière se basant plus sur un visuel chatoyant, qui fait mal aux yeux...) J'ai tout particulièrement apprécié le portrait de La Fontaine tout en combativité et en charme...
Il ne vous reste plus qu'à vous replonger délicieusement dans leurs oeuvres ! ;-)
Basileus.