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1 octobre 2006

Good night, and good luck.

Aujourd'hui, bien plus que d'un film, j'ai envie de parler de ce qui me tient le plus à coeur et ce depuis que je m'intéresse à ce qui se passe autour de moi : la liberté d'expression. Car non seulement à mes yeux l'excellent film de George Clooney Good night, and good luck représente un appel à la liberté d'expression et à la tolérance, mais il est également la sonnette d'alarme que chacun devrait écouter consciencieusement en des temps perturbés passés ou présents.

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"Nous ne devons pas confondre dissentiment avec déloyauté. Nous devons à l'avenir nous rappeler que cette accusation n'est pas fondée et que cette condamnation repose sur un témoignage et un procès qui aurait dû se fonder sur la loi. Nous ne marcherons pas la peur au ventre, c'en est une parmi d'autres. Non, nous ne serons pas conduits par la peur vers une ère de folie si l'on creuse dans notre histoire et notre mode de pensée, et que l'on se souvient que nous ne descendons pas de lâches -pas d'hommes qui ont eu peur d'écrire, de parler, de s'associer et de défendre des causes qui, à l'époque, étaient impopulaires." -Edward R. Murrow-

756px_Joseph_McCarthyTout d'abord, avant même de parler du film, il me semble fondamental de vous remettre deux trois remarques en tête concernant le thème de Good night, and good luck. Le film retrace les heures sombres de l'Amérique, plus précisément les années noires de la Guerre Froide. De 1950 à 1953, un homme défraie la chronique américaine, le sénateur du Wisconsin, Joseph Mac Carthy. Ce dernier entreprit avec succès d'inventer une conspiration communiste au sein même du département d'état.

La très fameuse "chasse aux sorcières" commençait. A la tête d'une commission juridique basée sur un fondement juridique quasiment inexistant ( En revanche, plusieurs personnes furent incarcérées parce qu'elles considéraient que la commission violait la liberté d'expression. En effet, refuser de comparaître ou mentir à une commission parlementaire est un délit), Mac Carthy devient peu à peu incontestable et tout puissant. En effet, en 1952, lors de l'élection du président Eisenhower, il  avait en effet hérité de la présidence de la commission sénatoriale des opérations gouvernementales en plus de sa sous-commission d'enquête.

good_night_and_good_luckGood night, and good luck est la phrase avec laquelle le présentateur Edward R. Murrow clôturait généralement son émission de télévision. Celui-ci, présentateur sur la chaîne de télévision CBS dans les années 50, aux côtés de son producteur Fred Friendly, avait décidé de s'attaquer au sénateur, alors tout puissant et inattaquable. Ce film réalisé par George Clooney en 2005 démontre dès les premières minutes de visionage un incroyable sens de la mise en scène et de la prise de position politique. George Clooney réalise ici un véritable coup de maître à travers ce film engagé et volontaire.

Une réalisation impressionante

Les choix de réalisation sont ici primordiaux pour nous mettre dans l'ambiance austère et malsaine du MacCarthysme. Clooney choisit le noir et blanc conférant à son film une toute nouvelle dimension, faisant par là même entrer le spectateur au sein de l'équipe de rédaction de CBS. Entre fumée épaisse de cigarette et fond musical jazzy et velouté, le spectateur est réellement charmé. Le monde de la télévision prend ici une toute nouvelle dimension, confronté à l'univers impitoyable des sponsors et de la politique (tous deux étrangement proches...) Ceci (et je n'hésiterai pas à le rappeler tout le long de mon article) est tout à fait d'actualité, car en nous parlant des années 50, Clooney nous sert également un sujet brûlant d'actualité. Les évènements du MacCarthysme ne sont pas sans nous rappeler cette nouvelle guerre dans laquelle nous sommes désormais entrés bien malgré nous : la lutte contre le terrorisme. Car lorsque je vois les dirigeants de CBS hésiter à s'opposer à la toute puissance de Mac Carthy, je vois aujourd'hui les dirigeants de la Fox ne pas hésiter à faire du clientellisme auprès de Bush. Les époques changent mais non les hommes.

good_night_and_good_luck_wallpaper_1_1024Avoir le courage de ses opinions.

George Clooney connait bien le thème (il réitérera d'ailleurs ce besoin avec son second film Syriana), étant lui-même le fils d'un présentateur télévisé connu pour ses prises de position tranchées. Et c'est d'ailleurs tout le thème du film. Edward Murrow, bien que ne se considérant pas comme sympathisant communiste lutte pour un idéal démocratique où la liberté d'expression et surtout la liberté de la presse doivent être. Notion fondamentale pour les Etats-Unis. Clooney en profite pour rappeler qu'un pays qui se permet d'être moralisateur envers son prochain ne peut bafouer la liberté de ses citoyens. Là encore, voici un thème tout à fait d'actualité et problématique. L'on voit les directeurs de chaîne hésiter à laisser à l'antenne des émissions polémiques telles que celles de Murrow et préférer la neutralité d'émissions de variété. L'on peut se demander (encore aujourd'hui, d'ailleurs) quel est le devoir des médias ? Loisir ou culture ? Peut-être les deux, mais en tout cas il est primordial de ne pas censurer, de ne pas avilir la culture. Nous voyons encore trop d'aberrations télévisées de nos jours... Lorsque je vois qu'aux Etats-Unis (sans vouloir les stigmatiser, mais il est si facile de le faire, n'est-ce pas ?) l'on permet de laisser à l'antenne un Survivor où s'affronteront une équipe blanche et une équipe noire, simplement dans le but de faire de l'argent grace à la polémique engendrée, je me dis que nous sommes en train de tomber bien bas.

Un casting de rêve...

goodnightCe film d'une très grande qualité se permet, de plus toutes les audaces grace à des acteurs à la prestance et au charisme irréfutables. Je ne parlerai même pas de Georges Clooney dont les qualités d'acteur aussi bien que de réalisateur sont désormais incontestables... Tout d'abord, un très grand BRAVO à l'acteur principal David Strathairn (remarqué auparavant dans L.A. Confidential.) son Edward Murrow est d'une humanité incroyable et bouleversante, entre stoïcisme et doute. Je me permets également de mettre sur le devant de la scène un acteur que j'affectionne tout particulièrement, Robert Downey Jr dont l'interprétation est sompteuse, comme à son habitude...

Il est à noter que ce film a été nominé 4 fois aux Golden Globe en 2006, 6 fois aux Oscars et qu'il a remporté de nombreux festivals tels que le New York Film festival, le Venice Film festival, l'European Film Academy et le Broadcast Film Critics award.

En conclusion.

A une époque où Libération (journal de Samedi 30 Septembre 2006) se demande si l'on peut encore aujourd'hui critiquer l'Islam, où Télérama ne peut publier sa publicité où un lecteur critiquait la couverture médiatique de Nicolas Sarkozy, où Bush ment pour intervenir tranquillement en Irak et où tout simplement la chasse aux sorcières est la chasse à ceus qui se refusent à penser ce qu'on leur demande de penser, il s'avère plus que nécessaire de visionner un film tel que Good night, and good luck. Car jamais il ne faut oublier.

Basileus.

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Commentaires
B
Merci pour toutes ces précisions bien utiles, c'est effectivement très important de rappeler que la liberté ne tient qu'à un fil, ou ici, à un bout de papier...
Z
J'ai enfin visionné ce film ce soir et je l'ai trouvé vraiment très bien. Il faudrait reparler régulièrement de ce film, ou en faire d'autres du même genre, pour garder constamment en tête à quel point la liberté d'expression doit être défendue.<br /> Même face aux personnes puissantes? SURTOUT face aux personnes puissantes.<br /> Le sujet est effectivement d'actualité, ne serait-ce que par notre omniprésident qui est passé maître dans l'art d'utiliser les médias.<br /> La liberté de la presse ne s'use que lorsque l'on ne s'en sert pas, mais elle s'use malheureusement encore plus vite si l'on censure ou, ce qui est davantage le cas aujourd'hui dans notre pays, si l'on s'autocensure. Car la première pression sur les journaux n'est pas politique, elle est économique; la pression des annonceurs qui apportent de l'argent aux journaux qui en retour sont priés de ne pas les maltraiter. C'est pourquoi il est indispensable d'avoir des journaux indépendants (d'abord financièrement) et de soutenir ces journaux (en les achetant). Car j'extrapole sur une autre constatation des plus amères: la presse écrite en France se porte (très) mal: en 2006, Le Monde a vendu 125000 exemplaires, Libération 75000, Le figaro 140000 et Le Parisien 90000. A titre de comparaison, France soir en vendait plus de 400000 en 1981 et passait déjà pour sinistré à l'époque. Alors tâchons de soutenir la presse écrite si nous voulons qu'elle reste indépendante et intelligente, avant qu'elle ne soit dominée par les journaux gratuits, les jeux et la presse people.<br /> Bonsoir, et bonne chance.
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